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juin 2024

Le marché du sport: entre potentiels et contradictions

Par Lionel Farget

Le sport est un puissant catalyseur de changement dans notre société. Ces dix dernières années, il est devenu une force progressiste, luttant contre le racisme, l’inégalité ou encore le changement climatique.

Il est d’ailleurs le secteur sur lequel les attentes se cristallisent, à bien des égards. Déjà sur le rôle qu’il joue dans la société, les émotions qu’il procure ainsi que le bien-être et l’épanouissement qu’il offre à ses adeptes. Ces éléments étant si centraux dans l’équilibre et les attentes de vie des sportifs d’aujourd’hui et notamment de la GenZ, véritable moteur dans l’évolution des pratiques et des tendances de notre société.

Comprendre comment le sport alimente le changement est essentiel pour les dirigeants et les marques.

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Si le sport est réellement un catalyseur du changement, on lui en demande encore davantage. Aller plus loin, aller plus vite, nous emmener là où on ne l’attend pas, là où on ne lui a pas encore demandé d’aller.

On attend par exemple que les acteurs du sport placent l’impact RSE au centre de leur démarche, et ce, dans tous les aspects de sa démarche. De la construction des enceintes sportives aux plans de communication en passant bien entendu par la conception des produits qui doivent répondre à un modèle toujours plus vertueux et qu’il est nécessaire de conjuguer au volet d’accessibilité financière et d’égalité des chances.

Et il ne faut pas oublier que le sport est, par essence, un formidable vecteur d’innovation dans sa quête de performance et d’excellence qui bien souvent permet d’améliorer le quotidien ou l’équipement du plus grand nombre.

Le sport est d’autant plus sous le feu des projecteurs qu’il a pris une place centrale dans la culture de la GenZ. L’évolution de la mode, la recherche de bien-être et de confort ou l’avènement de la culture hip-hop en sont des exemples marquants. Ils placent les articles de sport au cœur des gardes-robes, les sneakers devenant par exemple aujourd’hui l’accessoire numéro 1 pour finaliser une tenue. Les textiles souples et les coupes amples sont aussi devenus une norme et l’acceptation du sportswear comme tendance noble d’habillement a notamment été incarné par les marques de luxe qui n’hésitent plus à intégrer ce genre d’articles dans leurs collections.

Illustration s’il en est de cette percée du sport dans notre quotidien avec Arc’teryx, marque technique outdoor canadienne, dont on retrouve désormais les produits portés par de nombreux Shanghaïens en plein Pudong.

Vous avez dit leisurisation? Oui, mais pas que!
Si l’évolution des villes et les enjeux de transport sont un élément de réponse, dans la pratique du vélo par exemple, il s’agit surtout d’une tendance de fond qui accorde au moins autant d’importance à la recherche de confort en toutes situations qu’à une volonté de s’affranchir des normes établies.

L’ascension supersonique du Padel ou du Pickleball, plébiscités pour leur côté playful et leur accessibilité en est un formidable exemple. Les terrains sont plus petits, les matchs se jouent en double, réduisant considérablement les requis techniques et physiques à l’entrée et ouvrant ainsi leur pratique au plus grand nombre.

L’avènement d’autres sports, historiquement considérés moins nobles par certains ont fait ou feront leur entrée aux JO, comme le skateboard à Tokyo, le breakdance à Paris ou le Flag Football à Los Angeles, ce qui confirme cette volonté de rebattre les cartes.

Le sport s’érige aussi comme un acteur de changement dans la lutte des classes. L’Adidas Arena installée Porte de la Chapelle, quartier autrefois sulfureux, et antre du Paris Basket, club seulement créé en 2018 et déjà champion d’Europe, en est le parfait exemple avec la mission assumée d’être le trait d’union entre Paris et sa banlieue.

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Aujourd’hui les marques de sport ont donc un challenge aussi important que multiple dans la conception de leurs collections, mais aussi et surtout dans leur manière de communiquer avec la nécessité de ne pas avoir de discours stéréotypés.

On le sait, la GenZ et la jeunesse au sens large ne peuvent être considérées comme un ensemble. Les marques doivent prendre la mesure des nuances pour être capable de s’adresser efficacement à cet ensemble composé d’une multitude de courants tous aussi mouvants et véloces les uns que les autres. Cette GenZ regroupe en effet des presque trentenaires et des jeunes adolescents qui ne peuvent être uniquement considérés comme un ensemble. Ils ont certes toujours connu les réseaux sociaux, mais n’utilisent pas forcément les mêmes, ni de la même manière, ni avec la même intensité. Et il est par ailleurs impossible de prédire ce qu’il en sera dans un horizon moyen terme.

Un ciblage efficace nourri par des études et une analyse constante des ventes n’est pas suffisant. Il faut davantage s’intéresser à des aspects sociologiques, à des réflexions sur la place que doivent prendre ces marques dans la société ou encore recouper les attentes futures de leurs audiences. 

Le social listening et les rapports de tendance n’ont jamais eu autant de valeur à l’heure où les marques de sport peinent à toucher efficacement et sur la durée leurs cibles, à mettre de la chaleur dans leurs communications ou à sélectionner les outils les plus pertinents.

Mais résumer les clés du succès à des analyses bien faites serait une erreur qu’il est primordial d’éviter. Se lancer dans l’innovation, sortir du cadre, tester, analyser pour ensuite mieux faire s’apparente comme une nécessité pour celles et ceux qui pilotent les marques de sport qui ont réellement l’ambition d’émerger dans leur secteur.

La construction de marques et de projets d’entreprises forts et différenciants est nécessaire pour construire l’unicité de leurs prises de parole. Et l’utilisation à outrance d’influenceurs comme panneaux publicitaires est tout sauf une approche pertinente et viable à long terme. L’avènement de réels créateurs de contenus, parfois à la place d’imposteurs, est une évolution qui doit être suivie avec attention.

Aujourd’hui, un sportif ne peut pas vendre de la même manière des yaourts, des chaussures et des voitures. Il faut comprendre que ces sportifs sont eux-mêmes des marques, qui ont un capital marque, des attributs, des points forts, des points faibles et des limites. Il faut être capable de capitaliser sur ces articles pour en faire ressortir les accointances avec la marque que l’on défend et admettre que l’utilisation de sportifs dans ses communications n’est pas une formule magique vers la réussite, la performance ou la construction d’un héritage de marque.

Les grands événements sportifs en sont malheureusement l’exemple flagrant. En période de Coupe du Monde de Rugby, les rugbymen se retrouvent sur toutes les campagnes car il faut profiter de l’événement. Oui, OK. Mais encore une fois, afficher un rugbyman avec vos produits ne fera pas de votre marque un poids lourd de son industrie pour autant.

En revanche, sélectionner le bon athlète, le bon créateur de contenu pour penser à une activation qui lui ressemble, qui vous ressemble, qui ressemble à l’audience que vous souhaitez toucher et qui sera à même de vivre dans le temps et de se décliner aura un effet démultiplié sur l’ensemble des KPI que vous vous serez fixés. On en revient à la notion de marque, de storytelling, de discours qu’il faut être capable de respecter et de la constance qu’il faut viser.

En effet, si la GenZ est mouvante, votre marque, elle, ne doit pas l’être dans de trop grandes largeurs. Il est primordial que l’on retrouve ce qui fait sa force et sa différenciation dans toutes ses prises de parole et sur le long terme.

Elle doit être constituée à la fois d’un noyau inaltérable, constitué de ses valeurs, de sa promesse et d’un projet d’entreprise bien balisé ainsi que d’une couche plus malléable qui englobera ce noyau et qui regroupera les éléments de forme de langage et de prises de parole. Elle devra être capable de s’adapter aux évolutions de l’instant, ce qui veut dire être capable de parler rugby lors de la coupe du monde, de la bonne manière, avec les bons partenaires et surtout pour les bonnes raisons pour que personne n’oublie qui elle est une fois le trophée remis au vainqueur!

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Comme dit plus tôt, il est difficile de parler de sport et de GenZ sans parler des outils, réseaux et usages apparus, développés ou transformés avec l’avènement de ces jeunes nés après 1997.

De Facebook à BeReal, en passant par TikTok et Twitch, ils ont rebattu les cartes des plans médias et des stratégies de communication à tel point qu’il est aujourd’hui impossible de passer à côté. Mais attention, il existe tout autant de mauvaises pratiques et de pièges dans lesquels il serait très dangereux de tomber. La légitimité d’une marque est profonde et longue à se mettre en place, mais si facilement démontable à l’heure des réseaux sociaux et badbuzz tout puissants.

Dans ce monde qui évolue très vite, de nouveaux puissants sortent du lot, toujours plus rapidement. Mais beaucoup disparaissent tout aussi vite et peuvent emporter avec eux de nombreux téméraires qui pensaient y trouver un nouvel Eldorado (coucou les NFTs).

À l’instar du propos sur les influenceurs, ces nouveaux réseaux sont des vecteurs qu’il est primordial de considérer avec la plus grande attention. Mais attention justement, on ne lâche pas tout pour faire all-in sur la nouveauté. Quand on engage sa marque, il faut le faire pour les bonnes raisons et avec un plan réfléchi, construit et pérenne. Ces nouveaux outils doivent répondre à une logique de valeur ajoutée.

Et justement. L’avènement du e-sport ces dernières années a pavé la voie à de nouvelles disciplines comme le “Kings Footbal” dont on a assisté à l’éclosion ces derniers mois. Le concept? Des équipes de foot à sept rassemblent des vedettes du ballon rond et des streamers tout aussi célèbres dans des matchs aux règles inédites plus proches du divertissement que du football, riches en highlights et dont les présidents sont à la fois commentateurs-streamers et parfois même amenés à tirer des penaltys.

Diffusées sur Twitch, les performances sont impressionnantes avec une pointe à 15 millions de visionnages pour le dernier match de la saison espagnole! Le format casse les codes du foot traditionnel et répond surtout exactement aux codes de ces plateformes et aux attentes de ces jeunes générations dont l’attention est souvent très versatile. Un remake de Panem et circenses? Pas exactement, plutôt du fun et des formats courts facilement consommables!

Et quant à la relation entre le produit et ses ambassadeurs, la question reste ouverte sur qui bénéficie le plus de l’apport de l’autre, mais une chose est sûre : pour l’instant tout le monde semble gagnant puisque les entreprises investissent de plus en plus massivement dans le “Kings Football” quand les communautés des streamers sont plus que jamais au rendez-vous!

En conclusion, si votre marque est suffisamment forte, vous devriez rapidement trouver les leviers qui vous permettront d’activer ces outils à condition d’avoir les bonnes cartes en main au moment de faire vos choix. Si votre marque possède suffisamment de ressources financières, les limites de performance ne seront plus tant des facteurs limitants que ça. La beauté de la chose, c’est que ces canaux permettent aussi bien des actions d’envergure que des actions tactiques pertinentes et performantes, et que les moyens de production d’aujourd’hui sont toujours plus accessibles avec des attendus davantage centrés sur la sincérité, l’authenticité et la connivence avec les codes de la cible et de la plateforme que sur l’unique qualité des visuels.

Fini donc la télé toute puissante réservée à une élite comme ont pu connaître les plus anciens d’entre nous. Vive l’ère de la créativité et pour ça, en tant que communiquant, il y a vraiment de quoi se réjouir! 

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